Invisible

L’homme invisible (ou presque)

Effectuer une recherche avec «traduction» ou «traducteur» dans les mots-clés, c’est un peu comme chercher une aiguille dans une botte de foin. Il faudra vous armer de patience.

Tradu-quoi?

Au détour d’une conversation sur le temps ou le dernier film visionné (Pride dans mon cas, bon remède face à la grisaille ambiante) arrive la question de votre métier. Quand on répond traducteur, on a souvent droit à: «Tu travailles avec un micro et tout? Cool!» Non, ça, c’est un interprète. Lui, on l’entend. Et être incarné par Nicole Kidman à l’ONU, avec Sean Penn en plus, ça vous augmente d’un coup la visibilité d’un métier. Avouons aussi que Nicole au bord de la crise de nerf à cause d’une phrase, ça aurait pu être drôle, mais pas forcément captivant. Alors tu traduis des livres? Non plus. Moi, je traduis «le reste». Toutes ces choses qu’on lit sans se douter qu’il s’agit de traductions. Pub, manuels, correspondances, communiqués et autres alimentent les flux considérables de la traduction et peuplent mon quotidien (en 2013, selon le Common Sense Advisory, la traduction représentait un marché de 37,6 milliards de dollars).

Invisibilité maudite, invisibilité chérie

Je travaille donc avec mes dictionnaires et mon meilleur ami, Internet. Comme je n’ai pas la science infuse, j’ai appris à faire des recherches efficaces. Malheureusement, je ne suis pas parfaite (j’essaye, promis!), et il m’arrive de faire des erreurs. C’est en général à ce moment que le traducteur devient visible. Drame, car ma profession exige de moi que je sois invisible. A l’université, on nous apprend qu’un texte qui «sent» la traduction est un mauvais texte. Ce qui explique aussi qu’on ne traduise normalement que vers sa langue maternelle, seule qu’on maîtrise pleinement. Voilà qui explique en grande partie l’invisibilité du traducteur: le texte qu’il produit doit passer pour un original. Si on ne devine pas ma présence, c’est mission accomplie! Et je m’en réjouis. Mais des fois, on apprécie aussi un soupçon de reconnaissance. Alors, parce que l’année touche à sa fin et que l’heure est aux remerciements, merci aux traducteurs de tous poils et à leur dévotion au maître mot.

Image via Flickr: The Invisible Man – Maurits Verbiest (CC BY 2.0)



Articles similaires


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *